AccueilSociété

Qui sont les six femmes qui reposent au Panthéon ?

Qui sont les six femmes qui reposent au Panthéon ?

Image :

© Hulton Archive/Getty Images

avatar

Par Pauline Ferrari

Publié le

L’artiste franco-américaine Joséphine Baker sera, le 30 novembre, la sixième femme à entrer au Panthéon.

Emmanuel Macron a annoncé il y a quelques jours l’entrée au Panthéon de Joséphine Baker, première femme noire et seulement sixième femme parmi les 81 personnalités qui y reposent. Le 30 novembre prochain, elle rejoindra Sophie Berthelot, Marie Curie, Germaine Tillion, Geneviève de Gaulle-Anthonioz et Simone Veil dans le monument parisien du 5e arrondissement.

À voir aussi sur Konbini

Sophie Berthelot

C’est la première femme à reposer au Panthéon aux côtés de son mari, le scientifique Marcellin Berthelot (1827-1907). Lui était chimiste, biologiste et homme politique. Il déposa plus de 1 000 brevets scientifiques et fut ministre des Affaires étrangères et de l’Instruction publique. Sophie Berthelot l’assistait dans ses recherches, mais ce n’est malheureusement pas pour cette raison qu’elle a été panthéonisée : elle y entre en sa qualité d’épouse du scientifique, et avait été distinguée “en hommage à sa vertu conjugale”.

Quand elle tomba malade au début du siècle, Marcellin Berthelot dit à ses six enfants qu’il ne pourrait pas lui “survivre”. Il décéda quelques instants après elle. Les causes de sa mort n’ont pas été clairement élucidées. La famille a accepté de le panthéoniser à la condition que Sophie soit enterrée avec lui. Le ministre Aristide Briand dit, dans son éloge, en 1907 : “Elle avait toutes les qualités rares qui permettent à une femme belle, gracieuse, douce, aimable et cultivée d’être associée aux préoccupations, aux rêves et aux travaux d’un homme de génie.” Ambiance.

Marie Curie

Née à Varsovie, en Pologne, en 1867, Marya Salomea Sklodowska vient à Paris étudier la physique et les mathématiques. Elle épouse le physicien Pierre Curie en 1895. Ils trouvent deux nouveaux atomes radioactifs, baptisés polonium et radium, et obtiennent le Nobel de physique en 1903, avec Henri Becquerel.

En 1906, son mari Pierre Curie meurt écrasé par un camion. Quelques années plus tard, en 1911, elle reçoit le Nobel de chimie. Seule femme au monde deux fois nobélisée, elle meurt en 1934. En 1995, ses cendres sont transférées au Panthéon avec celles de son mari, en présence du président polonais Lech Walesa : une décision du président François Mitterrand prise sur la suggestion de Simone Veil et d’autres personnalités. Elle est la première femme à entrer au Panthéon pour ses propres mérites et découvertes, et non pas uniquement pour sa qualité d’épouse.

Geneviève de Gaulle-Anthonioz

Première femme décorée de la grand-croix de la Légion d’honneur, Geneviève de Gaulle-Anthonioz (1920-2002) était la nièce du général de Gaulle. Étudiante en histoire, elle rejoint le célèbre réseau de résistance du Musée de l’Homme, l’un des premiers créés à Paris, en 1940. Elle commence ses premiers actes de résistance en déchirant des affiches allemandes, en fabriquant des croix de Lorraine ou en arrachant, du pont de la Vilaine, un fanion nazi qu’elle rapporte chez elle comme trophée. Avec ses amis étudiants, elle imprime et diffuse des tracts contre les nazis et le régime de Vichy. Dénoncée et arrêtée par la Gestapo en 1943, elle est déportée en janvier 1944 au camp de Ravensbrück où elle côtoie Germaine Tillion.

Revenue de l’enfer à la libération, elle travaille un temps au ministère de la Culture auprès d’André Malraux avec son mari Bernard Anthonioz. Fin 1958, elle rencontre le père Joseph Wresinski, créateur du mouvement Aide à toute détresse, qui deviendra ATD Quart monde. En 1964, elle prend la tête de l’association. En 1996, elle plaide devant les députés en faveur d’un projet de loi de cohésion sociale finalement adopté en 1998. Elle décède en 2002, et c’est en 2015 que le président François Hollande annonce son entrée au Panthéon aux côtés de l’ancien ministre de l’Éducation nationale du Front populaire Jean Zay et des résistants Pierre Brossolette et Germaine Tillion.

Germaine Tillion

Ethnologue, Germaine Tillion (1907-2008) a été une inlassable combattante des droits de l’Homme. Élève du sociologue Marcel Mauss, elle part en 1934 enquêter dans les Aurès sur la population berbère. Mi-historienne, mi-reporter, elle y effectue quatre missions.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, elle participe à la création du réseau du Musée de l’Homme, l’un des premiers réseaux de résistance à Paris. Elle aussi est déportée à Ravensbrück, en même temps que sa mère Émilie qui n’en reviendra pas. Titulaire de nombreuses décorations pour ses actes héroïques au cours de la guerre, elle est la deuxième femme à devenir grand-croix de la Légion d’honneur. À son retour des camps, elle travaille au CNRS et à l’École pratique des hautes études, rédigeant plusieurs livres sur Ravensbrück, l’Algérie ou son métier.

Simone Veil

Simone Veil (1927-2017) est née dans une famille juive aux origines lorraines. Elle est déportée à Auschwitz à l’âge de 16 ans lors de la Shoah, où elle perd son père, son frère et sa mère. Rescapée avec ses sœurs, elle se lance dans des études de droit et de science politique, avant d’entrer dans la magistrature en tant que haute fonctionnaire.

Nommée ministre de la Santé en 1974, sa notoriété et sa popularité doivent beaucoup à sa lutte pour faire adopter en 1975 la loi sur l’interruption volontaire de grossesse (IVG), malgré l’opposition alors d’une grande partie de la droite. Elle fut également présidente du Parlement européen, de 1979 à 1982. C’était l’une des personnalités préférées de l’Hexagone. Également académicienne, elle a été présidente de la Fondation pour la mémoire de la Shoah (2001-2007). Elle a été panthéonisée en 2018, un an après son décès. Son mari Antoine, décédé en 2013, repose à ses côtés.

Joséphine Baker

Résistante, militante antiraciste, artiste, Joséphine Baker fera son entrée au Panthéon cet automne, devenant la première femme noire à rejoindre les grandes personnalités qui y sont inhumées. Née dans le Missouri en 1906 d’une famille pauvre, Joséphine Baker fuit le domicile familial en suivant une troupe de vaudeville noire. Remarquée par un producteur, elle part pour Paris où, à 19 ans, elle devient une star de La Revue nègre, spectacle musical qui a contribué à populariser en France le jazz et la culture noire américaine.

Meneuse de revue, icône de cabaret, chanteuse, elle sera l’artiste la mieux payée du music-hall parisien. Elle obtiendra la nationalité française en se mariant en 1937, avant de s’engager dans la résistance pendant la Seconde Guerre mondiale. En 1939, elle rencontre le capitaine Jacques Abtey, qui sera responsable du contre-espionnage de la région de Paris, et est recrutée comme agent de renseignement, faisant passer des informations inscrites à l’encre sympathique sur ses partitions de musique.

Elle est envoyée par la suite en mission au Maroc et part en tournée au profit de la Résistance. Elle est nommée sous-lieutenant des troupes féminines auxiliaires de l’armée de l’air française. “Je n’avais qu’une seule chose en tête […] aider la France”, avait-elle dit dans des archives de l’Ina.

Elle a été décorée de la Légion d’honneur, de la croix de guerre et de la médaille de la Résistance. Elle décède en 1975 et est depuis enterrée à Monaco. Elle était un “modèle de femme vaillante et généreuse”, “nous lui devons cet honneur”, a écrit sur Twitter la ministre de la Culture Roselyne Bachelot. Sa cérémonie d’intronisation aura lieu le 30 novembre prochain.

Konbini news avec AFP